Gauthier, collecteur de fonds occultes malgré lui

Written By Unknown on Selasa, 18 Juni 2013 | 16.20

L'ex-notaire Jean Gauthier admet avoir collecté des « fonds illégaux » pour le PRO des Lavallois auprès de bureaux d'ingénieurs dans les années 2000, sinon un peu avant, mais affirme n'avoir jamais rien su de la collusion qui régnait alors entre firmes de génies à Laval. Les extraits d'écoutes électroniques diffusés par la commission laissent cependant entendre que l'homme en sait plus qu'il ne veut le dire.

Un texte de Bernard Leduc et François Messier

Lire aussi :De nombreuses allégations sur Jean Gauthier

L'homme de 74 ans, qui n'a cessé tout au long de la journée de minimiser à la commission son influence au sein du PRO des Lavallois, reconnaît avoir agi comme « courroie de transmission » entre ces bureaux d'ingénieurs et le parti de Gilles Vaillancourt.

M. Gauthier soutient cependant que jamais l'ex-maire ne lui a demandé de jouer ce rôle de collecteur de fonds. Il aurait plutôt été mis devant les faits lorsqu'un premier ingénieur, Lucien Dupuis de CIMA+, est venu lui porter de l'argent pour le PRO au nom de Gilles Vaillancourt. Et jamais par la suite, avance-t-il, il n'en a parlé au maire.

Il croit que le maire a dirigé les ingénieurs vers lui parce qu'il avait confiance en lui, tout en peinant à dire à la commission sur quoi reposait cette confiance.

« Pourquoi le maire a confiance en vous? Parce que d'après moi, il sait que je ne fouillerai pas là-dedans. Je me suis posé la question. Mais comment sait-il ça le maire? Parce qu'il connaît ma réputation. Mais comment connaît-il votre réputation? [...] Je suis reconnu comme ça, c'est sûr. » — Échange entre la commissaire Charbonneau et Jean Gauthier

Selon lui, le maire Vaillancourt doit avoir dit aux firmes : « va porter ton enveloppe chez Jean Gauthier » et tout s'est alors mis en place. Un représentant d'une firme appelait, venait porter l'enveloppe à son bureau pour la caisse du parti.

Il soutient qu'il remettait ce argent au représentant officiel du parti, Me Jean Bertrand, sinon à l'avocat Alfred Chevalier lors des paiements effectués par Jean-Pierre Sauriol, le grand patron de Dessau qui a remis sa démission la semaine dernière. 

« Avez-vous eu une conversation avec le maire? «  Jamais, jamais. C'était trop sophistiqué. Je le vois aujourd'hui. Jamais le maire ne m'a demandé de collecter. Jamais le maire ne s'est informé à moi pour savoir si telle personne était venue me porter de l'argent [...] ou le montant. » — Échange entre Jean Gauthier et le procureur Gallant

M. Gauthier affirme n'avoir jamais compter les sommes d'argent remises, ajoutant que personne ne lui a jamais parlé du fameux 2 % de la collusion, c'est-à-dire le pourcentage exigé des firmes pour obtenir des contrats à Laval.

L'ex-notaire ne peut dire pourquoi les firmes n'allaient pas porter l'argent au représentant officiel du PRO, Me Bertrand, sinon que le maire compartimentait peut-être le système de financement afin de mieux assurer son étanchéité. Il ajoute avoir fait tout ça « absolument pour rien », soit sans en tirer aucun bénéfice.

« C'était une erreur de ma part, mais je la prenais comme une flatterie. Je me disais, bon… comme un honneur. Ça rend service au parti. Un paquet de raisons plus mauvaises les unes que les autres. » — Jean Gauthier

Ses interlocuteurs auprès des firmes étaient notamment Jean-Pierre Sauriol (Dessau), Lucien Dupuis et Laval Gagnon (CIMA+).

Jean Gauthier soutient avoir arrêté de jouer ce rôle en 2005-2006 après le témoignage-choc de l'ex-ministre libéral Marc-Yvan Côté, qui avouait à la commission Gomery, avec regrets, avoir collecté des fonds occultes pour le Parti libéral du Canada.

L'ex-notaire croit avoir commencé à jouer le rôle de collecteur de fonds auprès des firmes de génie au début des années 2000, mais reconnaît qu'au regard du témoignage livré la semaine dernière par l'ex-vice-président de CIMA+, Lucien Dupuis, il est « plausible » qu'il ait en fait commencé dès 1996-1997.

 Il se défend de l'allégation de Me Jean Bertrand selon qui il devait approuver tout recours à la caisse occulte.

Gauthier conteste les allégations de Me Lambert

Jean Gauthier se défend d'avoir demandé à Me Pierre L. Lambert d'agir comme gardien de la caisse occulte du PRO, comme l'a soutenu ce dernier. Il admet toutefois avoir été deux fois au bureau de ce dernier pour retirer de l'argent, à la demande de Me Jean Bertrand. Il soutient avoir même dit à ce dernier qu'il ne voulait pas être sa courroie de transmission auprès de Me Lambert.

Interrogé sur le fait que Me Lambert a dit avoir fait un dernier décaissement de cette caisse occulte en octobre dernier, à sa demande, Jean Gauthier s'est borné à noter que le commissionnaire qui était allé chercher l'argent ne lui avait pas remis en mains propres. Il a plutôt soutenu que l'argent avait été remis à Pierre Desjardins, responsable des communications du maire Vaillancourt.

L'ex-notaire a expliqué que le rôle de collecteur de fonds était auparavant tenu par Jean-Louis Lesaux, un homme d'affaires proche du PRO depuis sa fondation. « C'était de commune renommée que l'argentier était M. Lesaux », a soutenu M. Gauthier.

Il ajoute que, sans avoir eu « connaissance de faits précis », la « rumeur » était que M. Lesaux récoltait pour le PRO tant auprès des ingénieurs que des entrepreneurs. Il ignore tout de ces montants ou du pourcentage perçu, ainsi que les noms des contributeurs.

Gauthier prend ses distances de Vaillancourt

M Gauthier, qui a confirmé à la commission n'avoir jamais eu de rôle officiel au sein du parti de Gilles Vaillancourt, soutient que sa réputation d'être proche de l'ex-maire est « surfaite ».

« J'ai jamais été ami avec le maire Vaillancourt [...] : on ne se fréquentait pas. » — Jean Gauthier

Jean Gauthier se défend d'avoir joué un rôle d'éminence grise ou de sage auprès de Gilles Vaillancourt, et tout aussi d'avoir été un ténor du parti. Gilles Vaillancourt, souligne-t-il, « était sa propre éminence grise ».

Il reconnaît avoir cependant été présent à tous les congrès du parti et s'être occupé de la vente de billets pour des cocktails de financement du PRO jusqu'en 1997.

Gauthier confronté à des écoutes électroniques

La commission a tenté d'établir que M. Gauthier était plus influent au PRO qu'il veut bien l'admettre et qu'il était au courant de l'existence du système de collusion entre firmes de génie en se basant notamment sur des extraits d'écoutes électroniques. Les enregistrements ont été effectués les 4 et 5 octobre, soit le jour de la descente de l'UPAC à l'hôtel de ville de Laval et à la résidence de l'ex-maire Gilles Vaillancourt ou le lendemain.

Le 4 octobre au soir, Me Jean Bertrand et Jean Gauthier ont échangé, sur le vif, plusieurs coups de téléphone où ils s'interrogent sur les motifs des descentes policières.

C'est M. Gauthier qui apprend la nouvelle à Me Bertrand, grâce à sa fille Mélanie, qui travaille au greffe de la Ville. Le ton des conversations montre l'ascendant de M. Gauthier sur l'avocat, qui cherche à le rassurer et lui disant qu'il n'a « rien à cacher ». Il lui enjoint notamment de ne pas démissionner.

M. Gauthier émet d'abord l'hypothèse que les descentes concernent les contrats de la Ville, puisque selon sa fille, les ordinateurs sont visés. Ils font aussi l'hypothèse que l'UPAC aurait de l'information sur le maire et ses finances personnelles. M. Gauthier se demande s'il y a un lien avec Tony Accurso, dont le nom est très présent dans les médias.

L'ex-notaire Gauthier ajoute qu'il ne sait pas ce que le maire peut avoir fait, et ni l'un ni l'autre n'évoquent un acte précis qui pourrait expliquer la descente.

La conversation révèle en outre que Gilles Vaillancourt, sa femme et les membres de sa garde rapprochée, dont son chef de cabinet Pierre Lafleur et son responsable des communications, Pierre Desjardins, se sont réunis le soir de la perquisition dans le bureau du vice-président du comité exécutif. 

Me Bertrand soutient par ailleurs que Pierre Lafleur lui a admis que l'administration Vaillancourt « s'attendait » à une perquisition du genre.

Interrogé sur ses allusions dans des écoutes électroniques aux contrats, Me Gauthier se défend d'y voir une preuve d'un rôle quelconque de sa part dans la collusion à Laval.

L'ex-notaire soutient, en fait, n'avoir jamais su qu'il y avait collusion entre les firmes de génie avant la commission.

« Jamais, moi, j'ai pensé qu'il y avait de la collusion entre les firmes de génie-conseil. » — Jean Gauthier

L'ex-notaire, qui a admis avoir collecté des fonds illégaux auprès des ingénieurs, soutient qu'il ne craignait pas alors que la descente de l'UPAC puisse l'affecter.

Un mystérieux délateur

M. Gauthier admet par ailleurs avoir profité de ses liens avec le numéro 2 du service d'ingénie de la Ville, Jean-Marcel Perreault, pour se renseigner sur la descente. Il en a  parlé, le 5 octobre, avec sa fille Mélanie.

M. Gauthier lui dit alors avoir évoqué avec ce dernier la possibilité que l'UPAC ait aussi perquisitionné le service de l'ingénierie à la recherche de cas de collusion et que M. Perrault lui a dit : « nous autres, tout est beau ». C'est alors qu'il laisse entendre à sa fille savoir le nom du délateur qui aurait permis à l'UPAC d'agir. Sa fille semble l'arrêter aussitôt par une série de « non, non, non » pour l'empêcher de le nommer au téléphone.

Confronté à l'extrait, cependant, M. Gauthier soutient qu'il a oublié le nom qu'il avait alors en tête, de même que celui que sa fille allait lui suggérer et qu'il semblait connaître : « Je ne sais pas, Madame la présidente ».

« Je vous jure aujourd'hui que je n'ai pas de nom en tête ! » — Jean Gauthier

Gauthier très proche de Me Bertrand

Jean Gauthier a affirmé par ailleurs qu'il était « très près » de Me Jean Bertrand, et insisté sur l'ascendance de ce dernier sur les finances du PRO, minimisant du coup la sienne. Il présente Me Bertrand comme une quasi-sommité dans le financement, précisant que lui ne « connaît pas ça, mais pas du tout ».

Il dit n'avoir donc par aimé que Me Bertrand, devant la commission, l'ait désigné comme un mentor dont il devait obtenir l'approbation: « Là là, je suis tombé en bas de ma chaise. Il prenait ses propres décisions, il faisait ses propres dépenses. Ça peut peut-être décharger sa propre responsabilité, mais... »

L'ex-notaire soutient même avoir profité de sa proximité avec le représentant officiel du parti pour déplorer que le PRO utilise les conseillers municipaux comme prête-noms. Me Bertrand, qui avait dévoilé cette pratique à la commission, avait plutôt dit qu'il avait été mis au parfum de ce stratagème par... Jean Gauthier, lors d'une réunion tenue en 1995, et à laquelle assistait Jean-Louis Lesaux.

« J'ai toujours dit à Jean Bertrand : ''oublie ça, les échevins''. [...] L'autre chose importante que je disais à Jean Bertrand, c'est qu'il y avait trop d'argent dans ce parti politique. » — Auteur

M. Gauthier a continué à rencontrer fréquemment Me Bertrand après avoir cessé son rôle de collecteur de fonds occultes. Ce dernier lui confiera alors ses déboires avec le scandale, en 2010, du remboursement des budgets de recherche et de secrétariat, utilisés par le PRO à des fins partisanes.

Les deux hommes se sont aussi parlé à l'automne dernier lorsque les bureaux du PRO et la résidence de Me Bertrand ont été perquisitionnés par l'UPAC, comme en font foi les écoutes électroniques. Il reconnaît enfin qu'ils se sont rencontrés en décembre dernier, comme l'a mentionné Me Bertrand, après avoir été convoqué à la commission. Il dément cependant avoir voulu profiter de la rencontre pour lui soutirer de l'information.

M. Gauthier soutient qu'outre Me Jean Bertrand, il n'avait que peu de liens avec d'autres responsables du PRO, avec des personnes de l'entourage de l'ex-maire Vaillancourt ou encore à la Ville de Laval. « Les seules informations que j'avais, au meilleur de ma connaissance, venaient de Jean Bertrand », a-t-il soutenu. On n'apprendra que par la suite qu'il avait parlé à Jean-Marcel Perreault dans la foulée de la descente à l'hôtel de ville. 

Il affirme avoir eu de rares contacts avec Pierre Lafleur, chef de cabinet du maire, ou Pierre Desjardins, de la firme de relations publiques National, proche du maire et impliqué au PRO.

Il se défend sinon d'avoir jamais rencontré Claude Deguise, ex-directeur de l'ingénierie à la Ville et décrit par plusieurs témoins comme le dirigeant du système de partage occulte de contrats. Il connaît cependant Jean-Marcel Perreault, numéro 2 dans ce département, avec qui il possède une fiducie.

Un notaire qui brasse des affaires

M. Gauthier a eu une compagnie, Gestion Claudimel, radiée en 2003, avec laquelle il a brassé des affaires avec Jean-Louis Lesaux au sein de la compagnie 132372 Canada Inc, radiée en 2006. Pendant dix ans, la compagnie revendait des terres achetées à des constructeurs.

Gestion Claudimel a aussi fait des affaires avec Giuseppe Borsellino, de Petra, et Alfred Chevalier pour la vente d'une quinzaine de terrains début 2000. Il pense que M. Borsellino, qui participait aux cocktails du PRO, avait des relations avec le maire Vaillancourt.

Il se défend par ailleurs d'avoir tiré de bons profits des contrats de cession de rues obtenus par la Ville pour son bureau de notaire. Ces contrats, dit-il, « ne représentaient pas 5 % de notre chiffre d'affaires ».


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