Terrés dans leur temple, les yézidis font le voeu de survivre à l'État islamique

Written By Unknown on Selasa, 20 Januari 2015 | 16.20

Prier malgré la guerre

Avec son temple et ses tombeaux, Lalesh, dans le nord de l'Irak, est un haut lieu saint pour les yézidis, une minorité religieuse du peuple kurde. Il est aussi devenu le dernier refuge de centaines d'entre eux, chassés par le groupe armé État islamique (EI).

Dès qu'on a franchi le point de contrôle de sécurité de l'armée kurde, avant même d'atteindre le tombeau du Cheikh Adi, il faut se déchausser. Ici, on entre sans jamais poser le pied sur le pas de la porte. Plutôt, on embrasse les pans de la structure millénaire.

« Lalesh est bénie, c'est un lieu de pèlerinage pour les yézidis. Nous croyons que c'est la religion la plus ancienne envoyée par Dieu sur la Terre qu'il a créée. Personne ne connaît l'âge exact de la Terre, mais quand Lalesh a été créée, la terre s'est mise à exister. L'air est devenu respirable. Et à ce jour, Lalesh demeure la source de vie pour la terre. » — Le gardien du temple

Le gardien du temple n'a d'autre nom que ce titre. Il vient d'une des trois seules familles à pouvoir vivre en permanence sur le site sacré.

Des réfugiés par centaines

Au total, ils sont à peine plus d'une vingtaine, dont un groupe d'hommes qui assurent bénévolement l'entretien des lieux, l'échine courbée, balais de paille à la main. Cette tradition immémoriale est maintenant bouleversée par la présence de plus de 450 familles yézidies venues y trouver refuge.

« Beaucoup de yézidis sont arrivés. Ils n'ont nulle part où aller, c'est impossible pour eux de vivre à l'extérieur. Alors, ils restent. » — Le gardien du temple

C'est le cas de la famille Ilias. Ensemble, ses membres ont fui l'arrivée du groupe armé État islamique (EI) dans leur village, en août dernier. Après avoir enduré l'enfer de la soif, de la faim et de l'isolement sur les hauteurs du mont Sinjar, ils se sont retrouvés ici.

« Dieu nous a donné la force. J'ai dit au revoir à mes parents en leur disant que je ne les reverrais jamais. On n'arrive pas à croire que nous avons survécu sur la montagne. » — Gulestan Derman Ilias

Abandonner les siens

Gulestan n'a rien oublié de la terreur qu'elle a ressentie ni de son déchirement quand ses beaux-parents, trop vieux et trop fatigués pour grimper la montagne, ont refusé de les accompagner plus loin.

« On ne savait pas ce qui se passait. Il y avait des combats constants. On ne savait pas qui était capturé, qui avait été tué. On ne savait rien du tout de ce qui leur était arrivé jusqu'à ce que leurs photos se retrouvent sur Facebook. Ils étaient tous les deux morts. » — Gulestan Derman Ilias

Morts de faim, selon la famille. Des milliers d'autres yézidis ont perdu la vie aux mains de l'EI, et jusqu'à 7000 yézidis, surtout des femmes, ont été fait prisonniers.

Dans les camps de réfugiés

Dans les camps, les histoires de ces femmes disparues se répètent. Les plus jeunes sont transportées comme du bétail d'une ville à l'autre et vendues comme esclaves sexuelles. Certaines arrivent parfois à donner des nouvelles à leurs familles, qui désespèrent de les voir un jour libérées.

Un rapport accablant d'Amnistie internationale rend compte de traitements et de sévices qui glacent le sang. « Le bilan physique et psychologique de l'épouvantable violence sexuelle que ces femmes ont subie est catastrophique. Beaucoup ont été torturées et traitées comme des objets. Même celles qui ont réussi à s'échapper demeurent profondément marquées », a déclaré Donatella Rovera.

La majorité de la violence serait, toujours selon le rapport, commise par des Irakiens et des Syriens. Sur les réseaux sociaux, on trouve des vidéos où des membres présumés de l'EI discutent du marché des esclaves yézidies. Combien devrait-on payer? Ça dépend. Si elle a les yeux bleus, c'est plus cher.

Un magazine du groupe a même publié cet automne un article cherchant à justifier la pratique par la religion. Les yézidis y sont dépeints comme des païens, des adorateurs du diable.

« La plupart des gens ne comprennent pas, et quand on veut blesser quelqu'un, on dit n'importe quoi, on véhicule des rumeurs. Nous, les yézidis, nous croyons qu'un seul Dieu est responsable du bien et du mal. Si Dieu veut quelque chose, bon ou mauvais, ça va se produire. » — Le gardien du temple

C'est loin d'être la première fois de leur longue histoire que les yézidis sont affligés de l'étiquette d'« adorateurs du diable ». L'interprétation erronée de leurs croyances et pratiques religieuses, tant par le christianisme que par l'islam, leur a valu des siècles de persécutions et de massacres.

Ils seraient aujourd'hui 600 000 en Irak, une communauté repliée sur elle-même et qui ne permet pas la conversion. Elle est gouvernée par un système de castes sociales très strict, qui interdit de se marier en dehors de sa caste, mais aussi en dehors de sa religion. Les contrevenants sont bannis.

Envisager l'exil

Quand l'EI s'est approché des villages yézidis cet été, les soldats kurdes, les peshmerga, se sont retirés plutôt que de combattre. Un repli stratégique selon les autorités, un abandon pour les yézidis.

« Ils nous ont trahis et nous allons continuer de le dire. Peu importe ce qu'ils font, nous allons dire que les peshmerga nous ont trahis. Ils sont des traîtres. » — Gulestan Derman Ilias

La semaine dernière, les peshmerga ont brisé le siège de Sinjar, mais les yézidis demeurent pour la plupart convaincus qu'ils ne seront jamais en paix en Irak. Le gardien du temple ne peut se résoudre à quitter la terre de ses ancêtres. Elle est au cœur de sa foi. Pourtant, il commence à penser que son peuple n'a peut-être pas d'autre choix.

« Les yézidis sont peu nombreux dans le monde. Ils appuient la paix, ne sont contre aucune autre religion, aucune autre nation. Vous devez les défendre, trouver une solution pour eux, les mener loin de cette menace. » — Le gardien du temple

Au fond du tombeau, à Lalesh, se trouve une petite pièce caverneuse dont le sol est jonché d'urnes contenant une huile réputée millénaire. Selon la croyance, si un linceul imbibé de cette huile est lancé et reste accroché au mur, la prière de celui qui le lance sera exaucée. Il faut y arriver les yeux fermés. Et on n'a que trois chances d'y parvenir. Trois chances pour que le vœu de vivre en paix et en sécurité se réalise. Heureusement peut-être, ils sont nombreux à venir faire le même vœu.

Regardez la version télévisée du reportage de Marie-Eve Bédard ce soir au Téléjournal sur ICI Radio-Canada Télé.


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