Pour vaincre l'EI, « il faut aller au sol »

Written By Unknown on Sabtu, 18 Oktober 2014 | 16.20

Par la sauvagerie de ses procédés et la fulgurance de son expansion en Syrie et en Irak, le groupe armé État islamique (EI) frappe les esprits et suscite bien des inquiétudes. Pourra-t-on freiner sa macabre avancée et quelle menace présente-t-il pour l'Occident? Analyse.

Invité de l'émission 24/60 de Radio-Canada, Alain Rodier, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement, déboulonne quelques mythes, mais assène aussi des vérités sur ce nouveau phénomène nommé EI.

Pour lui, « il n'y a pas 107 moyens » pour vaincre l'EI. Pour y parvenir, « il faut aller au sol », donc pousser plus loin l'engagement militaire des Occidentaux, dont les frappes aériennes ne font que « diminuer » l'influence du groupe terroriste, sans l'anéantir.

M. Rodier ne croit pas trop toutefois à l'éventualité d'un envoi de troupes au sol, les Américains et leurs alliés étant échaudés par les expériences passées. « Personne ne veut aller au sol, parce que les expériences récentes en Irak et Afghanistan n'ont pas été couronnées de succès extraordinaire. »

L'EI, un groupe riche et très bien armé? Oui, répond le grand spécialiste français du terrorisme, tout en nuançant cette aisance éphémère. Il invite à « raison garder » et rappelle que l'organisation amassait en effet beaucoup d'argent qui provenait de riches donateurs étrangers, mais il fait remarquer que cette source de financement commence à tarir.

Les terroristes de l'EI attaquent des banques, se livrent au racket des populations qu'ils contrôlent (environ 8 millions de personnes), font du trafic de pétrole, toutefois « cette richesse va diminuer de plus en plus, surtout qu'ils ont besoin de faire vivre les populations qu'ils ont sous leur coupe. [...] Un peu comme Ben Laden qui avait une grande fortune au démarrage et, à la fin, Al-Qaïda n'avait presque plus d'argent ».

« Quant aux armes, c'est vrai qu'ils ont récupéré énormément de véhicules et d'armes auprès de l'armée irakienne », cependant, note M. Rodier, cet arsenal nécessite une logistique pour le mettre en œuvre et des moyens pour l'entretenir. Que d'anciens militaires aient rejoint les rangs de l'EI avec armes et expertise, cela ne change pas trop la donne, à ses yeux.

Une menace réelle?

Alain Rodier précise d'abord que la bataille autour de Kobané, ville kurde dans le nord de la Syrie, n'est pas aussi stratégique qu'on le pense. « Par contre, sur le plan psychologique, c'est extrêmement important ».

Il fait remarquer que l'EI poursuit son offensive en Irak, notamment pour prendre le contrôle de la province d'Alambar, mais « ne pense pas qu'il menace directement la capitale irakienne, parce qu'il n'en a pas les possibilités sur le plan militaire. Par contre, quasi tous les jours, il déclenche des attentats terroristes dans cette grande ville ».

C'est que EI mène sa lutte sur deux fronts : « une action militaire traditionnelle, classique, et des opérations de type terroriste dans les contrées qu'il ne contrôle pas ».

Sa priorité est « de consolider ses positions et ensuite de faire marcher cette espèce d'État qu'il a créé dans le cadre du califat ».

« Les Occidentaux ont focalisé sur la chute du président syrien Bachard Al-Assad et ont favorisé l'émergence de groupes dont on n'a pas maîtrisé l'évolution, et particulièrement cette évolution islamique radicale qui a conduit à la construction de ce mouvement. » — Alain Rodier

Faut-il craindre l'EI en Occident?

Également invité de l'émission 24/60, Nicolas Henin, journaliste français qui a été otage de l'EI pendant six mois, souligne que « la principale menace des djihadistes, elle est pour les populations locales. On peut voir le problème du djihadisme du point de vue opposé, [du point de vue] des Syriens et, de ce point de vue, on peut voir qu'on exporte nos poubelles vers la Syrie. Les djihadistes posent un problème pour la Syrie, bien supérieur qu'ils n'en posent un chez nous. »

Qu'en est-il des combattants occidentaux qui succombent aux appels du djihad en Syrie et en Irak? Alain Rodier précise d'emblée que la majorité des volontaires étrangers qui rejoignent l'État islamique « ne sont pas des Occidentaux. Ce sont d'abord des Saoudiens, des Maghrébins, en particulier des Tunisiens et des Libyens ».

Et « tant qu'ils sont sur le théâtre de guerre syro-irakien, ils ne représentent pas un risque direct pour nous bien sûr, mais le problème se pose à leur retour. Mais, là également, il faut raison garder : tous les Occidentaux qui vont rentrer ne sont pas des terroristes potentiels. Il y en a beaucoup qui vont rentrer complètement dégoûtés de ce qu'ils ont vu, parce que ça ne correspond pas à l'aventure qu'ils imaginaient ».

Cela dit, « parmi les ''retournés'', il y a un pourcentage qui peut représenter un risque important, du style Merache [il s'agit en réalité de Nemmouche], qui a effectué l'attentat de Bruxelles », ajoute M. Rodier.

« C'est un problème qui vient de chez nous d'une certaine façon puisque ce sont des gens qui se sentent exclus par nos sociétés qui ont un problème d'intégration, un problème évident d'identité. J'ai cru comprendre que beaucoup de djihadistes ont des problèmes de famille mal résolus. Un certain nombre de gens viennent au djihadisme en raison de crises familiales mal résolues.  » — Nicolas Henin, journaliste français.

État islamique vs Al-Qaïda

Alain Rodier observe que, pour le moment, « à la différence d'Al-Qaïda - la maison mère qui est à la base de l'État islamique - EI il n'est pas internationaliste ».

Le combat de ce groupe terroriste est « localisé au Proche-Orient, en Syrie et en Irak, et il n'a pas développé pour le moment de cellules opérationnelles à l'étranger, alors qu'Al-Qaïda, qui est une nébuleuse, avait développé des cellules un petit peu partout. Ben Laden a envoyé des coordinateurs, des agents de liaison auprès de différents mouvements, comme Al-Qaïda au Maghreb islamique, auprès des Chebbabs [Soudan] ».

Le spécialiste n'écarte pas que l'État islamique change sa façon d'opérer, « s'il rencontre beaucoup de difficultés en Irak et en Syrie, comme on peut le penser dans les semaines à venir ».

« Pour le moment, pour eux [les membres de l'EI], c'est de vraiment de créer cet État islamique, le solidifier et, à partir de là, éventuellement, commencer à s'étendre. Ils l'ont déjà fait d'ailleurs, en particulier au Liban. Mais on peut craindre beaucoup des débordements sur la Jordanie, voire dans le Sinaï. » —  Alain Rodier

De la guerre psychologique

M. Rodier reconnaît l'expertise en communication des membres de l'EI, très actifs sur le web, mais aussi présents dans des supports écrits, comme la revue Dabik, dans laquelle ils diffusent leur propagande.

« Il est intéressant à suivre [leurs actions de communications] parce que, généralement, les islamistes radicaux disent ce qu'ils vont faire et font ce qu'ils ont dit. Donc, en décryptant un peu ce qu'ils déclarent, on comprend là où ils veulent aller », affirme-t-il.

Il y aussi le modus operandi, cruel et impitoyable, des terroristes de l'EI. Pour M. Rodier, les décapitations destinées à influencer les capitales étrangères n'ont pas eu vraiment l'effet escompté, puisqu'on assiste à des frappes de la coalition menée par les États-Unis.

Mais pour le journaliste Nicolas Hénin, « nous sommes tombés dans le piège des décapitations ».

« La décapitation d'un collègue est une chose horrible, mais il faut relativiser », souligne-t-il, « puisque nous ne parlons que de 4 morts, face à plus de 200 000 morts en Syrie depuis le début de ce conflit. 200 000 morts et l'Occident n'a pas été capable de rien faire. Et l'assassinat d'un seul journaliste américain, certes est atroce, un crime abominable, mais c'est le meurtre d'un ressortissant américain et les États-Unis réagissent par une opération militaire. Ça n'a aucun sens. »


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