Pourquoi l'ex-juge Delisle aurait-il menti?

Written By Unknown on Jumat, 20 Maret 2015 | 16.20

L'entrevue intégrale avec l'ex-juge

Exclusif - L'ex-juge de la Cour d'appel du Québec Jacques Delisle clame son innocence face à sa condamnation à vie pour le meurtre prémédité de sa femme, Nicole Rainville. Mais dans une entrevue exclusive à Enquête, il avoue avoir aidé sa femme à se suicider et explique son refus de témoigner lors du procès.

Jacques Delisle aura 80 ans en mai. Emprisonné dans l'aile de sécurité maximale au pénitencier de Sainte-Anne-des-Plaines depuis trois ans, il est abattu et a beaucoup vieilli.

Il dit que son arrivée au centre de détention de Sainte-Anne-des-Plaines après sa condamnation n'a pas été facile, du fait qu'il était juge. « Je me souviens m'être fait tirer des pommes, m'être fait tirer des cailloux. Mais avec le temps, tout ça s'est estompé. »

Jacques Delisle n'a pas témoigné à son procès. Il n'a donc jamais rien dit sur ce qui s'est passé le 12 novembre 2009 dans son appartement de Sillery, à Québec, où on a retrouvé sa femme ensanglantée sur le divan du salon, morte d'une balle dans la tête.

Pour la première fois, il donne sa version des faits. Il raconte que Mme Rainville avait perdu le goût de vivre depuis l'accident vasculaire cérébral (AVC) qu'elle a subi en 2007, la laissant paralysée du côté droit. Ce matin-là, elle lui aurait dit qu'elle voulait en finir.

« Là, elle m'a dit : "Jacques, je n'en peux plus. Je veux le pistolet qui est en arrière" », raconte-t-il, précisant avoir discuté longuement pour tenter de la dissuader de se suicider, mais en vain.

« Je suis allé chercher l'arme; l'arme était dans une boîte; le pistolet était dans une boîte. Dans la même boîte, il y avait le magasin qui était sorti du pistolet et j'ai inséré - il y avait trois balles dans le magasin - j'ai inséré le magasin dans le pistolet. J'ai chargé le pistolet et j'ai ramené tout ça à l'avant en passant près du bureau dans le hall d'entrée. J'ai déposé la boîte puis j'ai mis le pistolet sur la table en face de là où Nicole était assise », raconte Jacques Delisle.

« Les derniers mots qu'elle me dit : "Jacques, laisse-moi tranquille, laisse-moi une heure." Ce sont les derniers mots, puis elle m'a dit : "bonjour à tout le monde." »

Espérant qu'elle ne passerait pas à l'acte, l'ex-juge dit alors avoir quitté l'appartement pour y revenir une heure plus tard.

« J'ai couru vers Nicole, je me suis agenouillé devant elle, puis là, j'ai voulu me pencher. Je n'ai pas pu l'embrasser dans le visage, c'était plein de sang. Je me suis penché, et j'ai dit : "Nicole, Nicole". J'ai pleuré. » — Jacques Delisle

Jacques Delisle a menti à tout le monde en affirmant qu'il s'agissait d'un simple suicide. Il ne voulait pas dire qu'il avait aidé sa femme à se tuer en allant chercher le pistolet, en le chargeant et en le déposant près d'elle.

« Je doutais beaucoup de la réaction à la fois de mes enfants, et de la réaction de mes proches, de mes amis, puis peut-être du monde en général. Je ne suis pas sûr que les gens sont encore prêts à accepter une telle situation et je vous concède que ça a été stupide de ma part. »

En mentant ainsi, l'ex-juge Delisle se protégeait d'une accusation d'aide au suicide passible d'un maximum de 14 ans de prison.

« Objectivement, légalement, c'est un crime. Mais pour moi, ce matin-là, ce n'est pas ce à quoi j'ai pensé. Ce matin-là, je répondais au cri de coeur de Nicole. Dans ma tête, je ne commettais pas un acte, une offense criminelle. » — Jacques Delisle

Pour voir la frise chronologique sur votre appareil mobile, cliquez ici.

Pourquoi ne pas avoir témoigné?

Pourquoi n'a-t-il pas donné cette version en cour pour amoindrir sa peine? Jacques Delisle affirme aujourd'hui que la décision a été prise à la dernière minute à la suite de pressions de ses enfants.

« J'ai rencontré Me [Jacques] Larochelle, j'ai tout dit ce que j'étais pour dire. Mais le dimanche soir vers 8 h 30, la conjointe de mon fils Dominique est venue me voir et elle m'a supplié de ne pas témoigner. » — Jacques Delisle

« Elle m'a dit que ses propres enfants se faisaient agacer à l'école qu'il s'en était déjà trop dit à mon égard, de ne pas ajouter encore ce que j'étais pour dire que c'était affreux pour la famille de supporter tout ça », poursuit Jacques Delisle.

Le procureur de la Couronne, Charles Levasseur, qui a porté l'accusation de meurtre au premier degré contre l'ex-juge, s'est dit très surpris de ces affirmations. Il demeure quand même convaincu de la justesse de la peine infligée contre M. Delisle, mais ajoute que si sa version de l'aide au suicide avait été donnée aux policiers dès le départ, les choses auraient peut-être été différentes.

« Probablement que ça aurait changé l'approche. Mais oui, ça aurait modifié certaines choses. Est-ce que le chef d'accusation aurait été différent? Sincèrement, je ne peux pas vous dire », affirme Me Charles Levasseur.

Les entrevues intégrales avec la famille de Jacques Delisle, son avocat et le procureur de la Couronne sont disponibles sur ICI.Radio-Canada.ca/Delisle.

Ultime recours

Ce témoignage de Jacques Delisle est la pierre angulaire des faits nouveaux qui seront présentés au ministre de la Justice du Canada pour le convaincre de rouvrir son dossier. Il s'ajoute aux doutes soulevés par trois experts de l'extérieur du Québec, consultés par Enquête et The Fifth Estate, concernant la preuve balistique telle que présentée au procès.

« Je crois absolument totalement et sans réserve et sans limite à son innocence. Je suis convaincu que c'est une erreur judiciaire. » — Me Jacques Larochelle

C'est à Toronto que le sort de l'ex-juge pourrait se jouer. Dans les bureaux de James Lockyer, un avocat réputé qui se spécialise dans la défense de prisonniers injustement condamnés, qui ont épuisé tous les recours.

« C'est toujours un grand défi. Ces cas ne sont jamais faciles. [Jacques Delisle] a été reconnu coupable par un jury et ses appels ont été rejetés. Vous vous battez contre une présomption de culpabilité », souligne Me James Lockyer, qui n'a toutefois pas hésité à défendre la cause de l'ex-juge.

« Je prends les causes de personnes que je crois véritablement innocentes. Et je crois que M. Delisle est véritablement innocent. » — Me James Lockyer

L'appel au ministre est l'ultime recours qui reste à l'ex-juge Delisle. Si sa requête est rejetée, il devra purger sa peine jusqu'à l'âge de 101 ans si, bien sûr, il ne décède pas avant.

En attendant, les membres de la famille Delisle se relaient chaque mois pour aller le visiter en prison. « On le sait que c'est le recours de la dernière chance, mais on ne perd pas espoir parce que moi, je me suis toujours dit tant que il y a de l'espoir, il y a de la vie. [...] Sinon, il ne serait plus là. C'est ce qui le tient en vie », confie sa fille Elaine.

« C'est un cauchemar. C'est dur, ça n'a pas de bon sens. Cette journée-là, on a perdu notre mère et on a perdu notre père. Là, on veut le sauver », conclut son fils Jean Delisle.

Qui est James Lockyer?

L'avocat James Lockyer est le directeur et fondateur de l'Association pour la défense des personnes injustement condamnées ( AIDWYC). Il a été impliqué dans la dénonciation de plusieurs condamnations injustifiées au Canada, dont trois cas d'homicide. L'un de ces cas permet la libération de Guy Paul Morin en 1995, ce qui conduit à une enquête publique en Ontario en 1997. Cette même année, Me Lockyer coordonne l'analyse des tests d'ADN, qui vont permettre d'innocenter David Milgaard de l'assassinat de Gail Miller, en 1969. Milgaard avait passé 23 ans en prison avant d'être libéré.

En 2001, Me Lockyer fait partie d'un groupe d'avocats qui présente une demande auprès du ministre de la Justice pour un réexamen de la condamnation de Steven Truscott. En 1959, le jeune Truscott, âgé d'à peine 14 ans, avait été condamné à mort pour le viol et le meurtre de Lynne Harper. La Cour d'appel a refusé d'entendre la cause en 1959 et la Cour suprême a maintenu le verdict de culpabilité en 1966. Il est libéré en 1969, après 10 ans d'emprisonnement.

Le 28 octobre 2004, le ministre de la Justice renvoie la condamnation à la Cour d'appel de l'Ontario, après avoir été convaincu qu'une erreur judiciaire s'était probablement produite dans cette affaire. Finalement, la Cour ordonne que M. Truscott soit acquitté du meurtre.


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