«C'est là que Jocelyn Dupuis est entré dans ma vie...» - Ken Pereira

Written By Unknown on Selasa, 01 Oktober 2013 | 16.20

La genèse de la relation Pereira-Dupuis : reportage de Catherine Kovacs

La commission Charbonneau a entendu pour une première journée Ken Pereira, l'homme qui a entraîné la chute de l'ex-directeur général de la FTQ-Construction Jocelyn Dupuis en révélant ses comptes de dépenses. L'ancien syndicaliste, après avoir expliqué son ascension dans le milieu syndical, a raconté dans quelles circonstances M. Dupuis l'avait recruté au sein de la FTQ.

Un texte de Bernard Leduc et François Messier


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L'ex-directeur de l'Association nationale des mécaniciens industriels (1981), affiliée à la FTQ-Construction, a expliqué avoir été pour la première fois confronté à Jocelyn Dupuis vers 2005, dans le cadre d'une rencontre survenue lorsqu'il travaillait pour la Kruger, à Bromptonville.

Il était alors délégué de chantier au sein du local 2182, affilié au CPQMC-International.

À l'époque, 18 locaux de la FTQ-Construction et 28 du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (CPQMC-International) tentaient de collaborer au sein du Conseil conjoint de la construction. La FTQ était alors représentée par M. Dupuis.

« Jocelyn Dupuis voulait prendre le contrôle total du Conseil conjoint », soutient M. Pereira. Il ajoute que beaucoup de locaux de l'International estimaient d'ailleurs qu'il commençait à prendre trop de place.

Il a aussi vent que malgré la bonne entente, présumée présider aux relations entre les deux syndicats, des locaux utilisaient des gens pour intimider des travailleurs sur des chantiers.

Lors d'une assemblée, un homme, canne à la main, est d'ailleurs venu accuser la « gang à Jocelyn » de lui avoir « crissé une volée ».

M. Pereira a aussi expliqué qu'à cette époque, avec le directeur général de son local, Réjean Mondou, il avait tenté d'avoir accès une première fois aux comptes de dépenses de M. Dupuis, par souci de transparence, ce qu'il leur refuse.

Dupuis ramène Pereira au sein de la FTQ

Puis, vers la fin de 2005, sinon le début de 2006, Jocelyn Dupuis l'approche en personne pour qu'il fasse le saut à la FTQ-Construction afin de faire revivre le local 1981 des mécaniciens industriels. Ce dernier avait été réduit à une coquille vide lorsque M. Pereira et ses collègues l'avaient quitté pour l'International, en 1991.

« T'es un leader syndical, j'aime comment tu travailles », lui a fait valoir Jocelyn Dupuis, une première fois, avant d'en rajouter, lors d'une autre rencontre, disant qu'il a besoin de lui pour remettre le 1981 « sur la map ».

Le directeur général de la FTQ-Construction lui offre un salaire d'environ 80 000 $ ainsi qu'un compte de dépense. Il lui promet, surtout, de l'appuyer financièrement et légalement dans sa lutte pour imposer le 1981 face au CPQMC-International, comme le lui avait demandé Ken Pereira, qui redoutait une « guerre » à venir.

Ken Pereira est alors nommé directeur général du local 1981, mais cette nomination ne sera annoncée qu'ultérieurement, le temps qu'il puisse faire du maraudage auprès des mécaniciens industriels. Ce maraudage était illégal puisqu'il s'est fait à l'extérieur de la période prévue à cette fin. Il réussira à rallier environ 200, sinon 250 personnes.

Ken Pereira restera à la tête du local 1981 jusqu'à l'automne 2008, soit jusqu'à ce que le scandale des comptes de dépenses de Jocelyn Dupuis éclate. Il travaille depuis ce temps à Fort McMurray, en Alberta, pour des entreprises exploitant du pétrole extrait de sables bitumineux.

Syndicaliste : une vocation

M. Pereira explique avoir eu la vocation syndicale lorsqu'en début de carrière, en 1986-1987, il accepte de laisser sa place à la QIT, par solidarité, tout comme son père, à des travailleurs qui ont davantage besoin de travailler. Son geste est salué par le milieu syndical, ce qui détermine son implication dans le syndicalisme.

« Je savais que c'était vrai, que des gars ne travaillaient pas. » — Ken Pereira

M. Pereira sera d'abord affilié au local 1981 de la FTQ-Construction jusqu'à ce qu'en 1991, il passe au local 2182 du CPQMC-International avec quelque 500 membres du 1981. Il devient alors délégué syndical sur des chantiers pour ce syndicat.

Ce rôle fait de lui, de facto, le porte-parole du local syndical pour dire à l'entrepreneur qui allait travailler sur son chantier : « Quand je donnais des noms à mon contracteur, ça venait directement de mon agent d'affaires ».

M. Pereira explique avoir rempli cette tâche, de façon bénévole jusqu'à ce qu'il soit nommé syndic, par l'exécutif du syndicat. Son mandat consistait alors à scruter les livres du local 2182, ce qui n'avait jamais été fait de toute son histoire, son directeur général s'étant jusqu'alors contenté de fournir un rapport mensuel.

Le directeur général du local, Réjean Mondou, lui donne les livres, non sans lui avoir exprimé sa colère : « « Si je ne te connaissais pas, je te crisserais de l'autre côté de la fenêtre ».

« En vérifiant les livres, tu deviens d'une importance capitale dans la machine, parce que money is power. » — Ken Pereira

Il sera syndic pendant à peine un an puis sera nommé agent d'affaires dans la région de Montréal par M. Mondou. Il affirme que plusieurs membres de l'exécutif lui ont bien fait savoir que s'il n'était plus syndic, c'est parce qu'il « vérifiait les livres ».

Comme agent d'affaires, il a alors les pleins pouvoirs pour dire au contracteur quels travailleurs prendre sur son chantier. Il soutient avoir eu parfois de la pression de M. Mondou pour placer certaines personnes sur les chantiers : « Des fois, il venait catégoriquement m'imposer un nom ».

Il affirme avoir été par la suite pressenti pour devenir l'adjoint au directeur général, ce qui n'aura finalement pas lieu. Certains lui auraient dit que M. Mondou l'aurait considéré un temps pour ce poste afin de l'écarter de ses tâches d'agent d'affaires. M. Pereira dit qu'il était particulièrement troublé de constater que certains membres avaient beaucoup plus d'heures que d'autres.

Des directeurs de locaux très puissants

En fin de journée, M. Pereira a dénoncé le grand pouvoir dont disposent les directeurs généraux des locaux, tant à la FTQ-Construction qu'au sein du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (CPQMC-International), où ils portent plutôt le titre de gérant d'affaires.

Lorsque vient le temps d'approuver des comptes de dépenses, a-t-il expliqué, « ce sont les syndics qui font rapport à l'exécutif, et l'exécutif fait des recommandations » qui sont ensuite approuvées « par le président et le secrétaire financier ».

Or, « dans tous les locaux, le secrétaire financier est le directeur du local », a indiqué Ken Pereira, en précisant que son ancien local, le 1981, était le seul à faire exception lors de la brève période où il l'a dirigé.

« Ça donne un pouvoir incroyable. [...] On a le contrôle total du local », a-t-il souligné. « Plus que tu as de pouvoir, mieux c'est. Mais en même temps, c'est très dangereux, si ça tombe dans les mains de quelqu'un qui ne pense pas à l'avenir du mouvement syndical. »

Il soutient que s'il a fait une entorse à cette règle lors de son passage au local 1981, c'est parce qu'il avait croisé au local 2182 un grand syndicaliste qui était devenu paranoïaque au fil du temps, au point de se braquer contre ses travailleurs pour préserver son emploi.

« Si je suis directeur, c'est moi qui fait le placement [syndical]. En plus de faire le placement, c'est moi qui gère les livres. [...] C'est moi qui décide si toi, tu vas faire 80 000 $ ou 20 000 $ », a-t-il lancé en guise d'explication.

« Le pouvoir, ça peut aider, mais ça peut devenir néfaste aussi pour un métier. Si je suis corrompu, et j'ai le pouvoir ultime, je vais corrompre tout », a-t-il résumé.

L'homme et la machine

L'ex-directeur de l'Association nationale des mécaniciens industriels (1981), affiliée à la FTQ-Construction, a commencé son témoignage en décrivant son métier.

Ken Pereira a expliqué qu'il s'agit en fait d'installer de la machinerie, la monter, la démonter et faire de la maintenance. Par exemple : installer les pompes dans une raffinerie, les concasseurs dans une mine, la ligne de production dans une usine de fabrication d'automobiles.

« C'est un métier qui touche à peu près toutes les usines au Québec. » — Ken Pereira

M. Pereira, détenteur d'un DEP en mécanique industrielle depuis 1986, a aussi abordé l'aspect de la formation continue, qui permet aux mécaniciens industriels de rester à jour dans leur métier. Il déplore que les agents d'affaires des syndicats aient le contrôle des fonds de formation, ce qui les amène à privilégier les gens proches des locaux syndicaux.

Des sujets à explorer

L'ex-syndicaliste est susceptible de lever le voile sur différents volets d'intérêt pour les commissaires, dont :

  • les possibles liens qu'entretient le crime organisé avec des dirigeants de la FTQ et le Fonds de solidarité FTQ, dont Michel Arsenault;
  • l'élection en novembre 2008 de Richard Goyette au poste de directeur général de la FTQ-Construction, marquée par l'intervention du Hells Angel Jacques Israël Émond, comme révélé par l'équipe d'Enquête;
  • les conflits entre syndicats sur les chantiers de construction, dont M. Pereira dit avoir été victime au milieu des années 2000;
  • les comptes de dépenses de Jocelyn Dupuis, qu'il a révélés à Enquête, et qui constituent la base des accusations criminelles déposées contre le syndicaliste.

Ken Pereira parle publiquement pour la première fois depuis qu'il a conclu une entente à l'amiable avec la FTQ-Construction à l'automne 2010. M. Pereira s'était engagé du coup à ne plus travailler contre les intérêts du syndicat et de ses représentants, et à ne plus les dénigrer.

M. Pereira avait réclamé 600 000 $ pour atteinte à sa dignité, sa sécurité, sa réputation et sa liberté d'expression. Son syndicat et lui se sont finalement vu accorder une somme avoisinant les 500 000 $, mais la FTQ-Construction n'a jamais admis qu'elle avait quoi que ce soit à se reprocher.


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