Commission Charbonneau - « C'était les moeurs du temps... » - Gilles Cloutier

Written By Unknown on Jumat, 03 Mei 2013 | 16.20

Gilles Cloutier a fait du financement politique illégal, organisé au municipal 60 élections clés en main, blanchi de l'argent, ardemment courtisé des politiciens, fait des magouilles en tout genre, le tout au nom de sa firme Roche mais non, conclut-il après trois jours de témoignage : il n'était pas « malhonnête ».

Un texte de Bernard Leduc et François Messier

Lire aussi : Cloutier soutient avoir blanchi 30 000 $ pour un avocat devenu juge 

« Ma conscience me dit que je n'étais pas malhonnête, parce que c'était les moeurs du temps, a-t-il affirmé à la barre de la commission Charbonneau. Je ne voyais pas grand municipalités au Québec ou dans ma région qui ne respectaient pas la loi électorale par la contribution et par le financement ».

« Je ne me sentais pas malhonnête et je ne me sens pas aujourd'hui encore malhonnête, mais je peux dire à la commission que je ne le referais plus. » — Gilles Cloutier

Jeudi encore, Gilles Cloutier a expliqué à la commission que si les firmes donnaient aux partis politiques provinciaux, c'était pour mieux servir les municipalités qui étaient leurs clientes.

L'ex-vice-président au développement des affaires de Roche a souligné que sans subventions de Québec, les villes n'avaient pas les moyens d'accorder des contrats aux firmes de génie.

Les dons des firmes, soutient-il, facilitaient les contacts avec les élus qui avaient des objectifs de financement, particulièrement avec les ministres des ministères d'importance pour les villes et leur entourage politique. Il mentionne notamment les ministères des Affaires municipales, des Transports et de l'Environnement.

« Avec nos contacts, on était près de certains ministres. » — Gilles Cloutier

« Ça nous aidait pour avoir les subventions le plus tôt possible auprès du ministère », soutient-il, « Il n'y a pas de contrat s'il n'y a pas de subvention ».

M. Cloutier a expliqué que les firmes trouvaient l'argent nécessaire au financement politique en accordant des extras bidons aux entrepreneurs sur des travaux publics. Les villes payaient les extras et l'entrepreneur en reversait alors une part de 25 % à la firme complaisante. Les ingénieurs des firmes, notamment, servaient alors de prête-noms pour rediriger cet argent vers les partis politiques.

« C'était le moyen le plus facile pour donner de l'argent aux partis provinciaux. » — Gilles Cloutier

Il précise cependant qu'environ 80 % des sommes ainsi ramassées pour les partis par les firmes allaient au niveau municipal, le restant allant au provincial.

Selon M. Cloutier, presque tous chez Roche connaissaient ses méthodes, mais personne n'a exprimé de malaise.

L'ex-VP de Roche sera de retour à la barre des témoins le 13 mai pour la suite des contre-interrogatoires, la commission ne tenant pas d'audiences publiques la semaine prochaine. Il sera ensuite interrogé sous ordonnance de non-publication au sujet de l'opération policière Fiche, touchant la Ville de Boisbriand.

Un cocktail de financement pour Lucie Papineau

Gilles Cloutier a aussi expliqué qu'il a déjà organisé un cocktail de financement pour la députée de Prévost, la péquiste Lucie Papineau, au début des années 2000. Mme Papineau avait de la difficulté à atteindre ses objectifs de financement, a-t-il dit.

L'ex-VP de Roche dit avoir accepté à condition que le ministre des Transports Guy Chevrette soit présent : cela allait lui permettre d'intéresser les entrepreneurs en construction qu'il allait inviter. Quinze d'entre eux ont finalement accepté de verser 1000 $ à Lucie Papineau.

Parmi les entrepreneurs présents, Gilles Cloutier a nommé Giuseppe Borsellino de Garnier Construction, Joseph Carolla de Beaver Asphalte, Jacques Desjardins de Desjardins Asphalte et René Mergl de Nepcon.

Gilles Cloutier a expliqué qu'il s'était organisé pour que chacun des entrepreneurs puisse expliquer ses « doléances » au ministre Chevrette, mais en précisant qu'ils ne devaient pas discuter de contrats précis, tel que cela avait été convenu avec Guy Chevrette.

Il soutient que les entrepreneurs ont essentiellement dit au ministre que les appels d'offres du ministère des Transports étaient publiés trop tard. Selon lui, l'affaire a effectivement été réglée l'année suivante.

Lucie Papineau est aujourd'hui chef de cabinet de la ministre de la Famille et ministre responsable de la région de Laval Nicole Léger.

Cloutier dit que Chevrette voulait intercéder en sa faveur

En après-midi, Gilles Cloutier a réitéré au terme du long contre-interrogatoire de l'avocate du Parti québécois, Me Estelle Tremblay, que ce qu'il a raconté au sujet des « magouilles » de l'ex-ministre des Transports Guy Chevrette était authentique, et qu'il le maintenait.

Il en a même rajouté, en disant que Guy Chevrette lui a dit qu'il allait intervenir en sa faveur pour ne pas qu'il perde son emploi chez Roche après qu'il eut été condamné par le Bureau de la concurrence, en janvier 2001, pour son rôle dans un cartel du déneigement.

Gilles Cloutier affirme qu'il lui avait dit, lors d'une partie de golf, qu'il était inquiet pour son emploi, et que celui-ci lui avait répondu : « Gilles, je vais en parler à tes patrons moi. En voulant dire [...] pour pas que tu perdes ton emploi. »

L'avocat de Guy Chevrette, Éric Vallières, a pour sa part annoncé qu'il déposera une requête à la commission le 13 mai pour pouvoir contre-interroger Gilles Cloutier. La commissaire Charbonneau a déjà laissé entendre que la requête serait accordée.

L'ex-vice-président de Roche avait dit plus tôt que cette condamnation était largement connue parmi les élus de la Couronne Nord qu'il fréquentait, y compris à l'époque du contrat de construction de la route 125 dont il avait parlé mercredi. L'affaire avait été étalée dans les médias.

Dans le même ordre idée, plusieurs des élus présents lors des évènements que Roche organisait au stade olympique étaient « certainement » au courant de toute cette affaire, a dit Gilles Cloutier. « Personne ne m'en parlait », a-t-il assuré.

L'interrogatoire de Me Tremblay a aussi fourni l'occasion à Gilles Cloutier de dire qu'il n'avait fait ni collusion ni corruption dans le cadre de contrats accordés par le MTQ. À ce sujet, il dit avoir tout juste fourni des informations qui n'étaient pas privilégiées selon lui.

Roche contre-interroge son ancien employé

L'avocat de Roche, Michel Massicotte a longtemps contre interrogé le témoin en fin d'avant-midi. Il s'est appliqué par divers moyens à miner le crédibilité de Gilles Cloutier. Il s'est cependant fait rappeler à l'ordre par la commissaire Charbonneau, qui lui a demandé assez rapidement de « baisser le ton ».

Me Massicotte a notamment soumis au témoin que Roche avait obtenu un premier contrat pour l'usine d'épuration des eaux de Saint-Stanislas-de-Kotska dès septembre 2001, soit bien avant que Gilles Cloutier n'invite le maire de la municipalité Maurice Vaudrin à l'évènement organisé au stade Olympique en avril 2004. 

L'avocat de Roche a notamment souligné que la municipalité avait adopté en août 2002 une résolution confirmant l'embauche de Roche pour tous les aspects de l'offre de services dans ce dossier. Le témoin a convenu qu'il n'était pas au courant de cette affaire. 

Me Massicotte a aussi mis en doute la liste des municipalités de la Couronne Nord de Montréal pour lesquelles Gilles Cloutier dit avoir réussi à obtenir des contrats pour Roche. Le témoin a convenu que l'avocat de Roche avait peut-être raison en ce qui concerne les municipalités de Bellefeuille, Lac-Supérieur, Piémont et Sainte-Anne-des-Lacs et Saint-Ambroise.

L'avocat de Roche a aussi soutenu qu'Yves Lortie avait quitté Roche en mai 2002, et qu'il ne pouvait pas être présent lors de la rencontre avec le maire de Tremblay qui a suivi la demande de pot-de-vin alléguée de Frank Zampino. M. Cloutier, qui avait situé cette rencontre en novembre 2002, a répondu que la rencontre devait avoir lieu plus tôt dans ce cas. Il a assuré qu'Yves Lortie était présent. 

Me Massicotte a aussi soutenu que Gilles Cloutier avait souvent fait de fausses réclamations à Roche en cherchant à se faire rembourser des petits-déjeuners dans des restaurants qui n'en servaient pas. Le témoin n'a pas répondu directement à ces allégations, mais a soutenu que toutes les fausses réclamations qu'il avait faites étaient connues de Marc-Yvan Côté.

L'homme des magouilles

Gilles Cloutier explique depuis mardi comment il a mis en oeuvre des « magouilles » dans le cadre de la stratégie de développement des affaires qu'il pratiquait au bénéfice de la firme de génie-conseil Roche.

L'homme de 73 ans décrit comment il a utilisé son énorme réseau de contacts dans les milieux politiques et l'argent que Roche mettait à sa disposition pour pervertir le système démocratique québécois.

Après avoir exposé l'ABC des élections clés en main, qui repose sur du financement politique illégal versé par des entreprises ou des prête-noms, Gilles Cloutier a expliqué comment il manoeuvrait pour que Roche tire profit de ses activités.

L'ex-vice-président au développement des affaires de Roche (1995-2005) a montré comment l'évènement annuel que Roche organisait au stade olympique permettait à la firme d'agir en intermédiaire entre des élus municipaux et des ministres, notamment ceux des Affaires municipales, des Transports et de l'Environnement, susceptibles de leur fournir des subventions.

Gilles Cloutier a aussi raconté mercredi diverses histoires de collusion et de corruption, dont :

  • celle d'un tronçon de 31 kilomètres de la route 125, entre Saint-Donat et Lac-Supérieur, pour lequel Roche a hérité des plans et devis après qu'il est intervenu auprès de Guy Chevrette. Il a accusé l'ex-ministre des Transports du gouvernement péquiste d'avoir favorisé l'entreprise Asphaltes Desjardins, en soulignant qu'un ami du ministre, Gilles Beaulieu, avait empoché beaucoup d'argent au passage. L'appel d'offres pour les travaux a été truqué;
  • celle de l'usine de filtration de Saint-Stanislas-de-Kostka, dans laquelle il soutient avoir réussi à acheter la complicité du maire Maurice Vaudrin en le présentant à d'anciennes gloires du Canadien de Montréal. Gilles Cloutier affirme qu'avec la complicité du maire, il a ensuite réussi à truquer l'appel d'offres pour les travaux de construction au profit de l'entrepreneur Yves Loiselle, désigné par Roche pour l'emporter.

Gilles a également expliqué que Roche a longtemps loué une maison qu'il possédait à Pointe-au-Pic, dans Charlevoix, afin d'en offrir gracieusement l'usage à des élus, dont Guy Chevrette, l'ex-maire de Chertsey Daniel Brazeau, et l'ensemble des élus de Sainte-Julienne, où Gilles Cloutier a organisé au moins trois élections clés en main au fil du temps.


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